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SENEGAL-PATRIMOINE-CULTURE-PROFIL / Diossy Mbengue, mémoire vivante du « penc » de Mbot

Il faut vraiment s’employer, pour interrompre Oumar Mbengue, 74 ans, quand il se met à narrer l’histoire de la communauté lébou, les premiers habitants de la région de Dakar, dont il représente une véritable mémoire vivante.

Surnommé Pa Diossy par ses intimes, Oumar Mbengue utilise toute la passion autorisée par son âge pour perpétuer la mémoire de sa communauté et vulgariser ses valeurs auprès des jeunes générations.

« Je m’appelle Oumar Mbengue, mais tout le monde me connait sous le prénom de Diossy ou Pa Diossy. Si vous demandez Oumar, vous risquez de vous perdre », lance-t-il avec un large sourire.

Mais c’est pour marteler tout de suite, invariablement : « Ce que je vous raconte m’a été conté par ma mère, mon oncle et le défunt Jaaraf du penc de Mbot, Farba Paye qui était également mon oncle ». Comme s’il était nécessaire de donner un cachet d’authenticité à ses propos.

« Être lébou, c’est dans le cœur, et tout ce que l’on raconte est dans nos cœurs et notre esprit », dit ce notable de Mbot, l’un des douze « penc » lébou, des territoires symboliques et espaces de socialisation et de médiation où se réglaient les problèmes de la communauté.

Les membres de la communauté se retrouvaient aussi dans les « penc » pour discuter, légiférer, juger ou célébrer divers évènements traditionnels et commémoratifs.

Ils représentent aussi, sous ce rapport, une survivance du pouvoir traditionnel lébou.

La collectivité lébou de Dakar compte douze « penc ».

Diossy Mbengue dit avoir grandi entre le « penc » de Hock et celui de Mbot, au centre-ville de la capitale sénégalaise.

De par sa descendance, il est de la lignée des « soumbar », qui lui confère un statut de gardien du temple.

« Les soumbar sont choisis pour diriger, être élu à un poste de responsabilité dans la société lébou grâce à la lignée maternelle, et j’en fais partie », déclare cet ancien agent commercial.

De petite taille, le teint clair, les lunettes bien ajustées sur le visage, Pa Diossy, toujours d’une humeur taquine, ne passe pas inaperçu dans son quartier de la rue Raffenel, en plein centre-ville de Dakar.

La configuration des maisons qu’il fait découvrir aux visiteurs de circonstance est restée authentique malgré le poids des années, en dépit de certaines modifications.

Derrière lui, une porte s’ouvre sur une grande surface constituée de concessions construites en dur et surplombées de toitures en ardoise.

Devant des chambres et appartements construits séparément, des femmes sont en train de s’affairer à leurs tâches quotidiennes.

Pa Diossy passe à côté d’un jeune homme en train de balayer la devanture d’un bâtiment et qu’il présente comme son neveu, avant d’emprunter un couloir sinueux menant à ses appartements privés.

« C’est une joie d’être né et d’avoir grandi dans un penc, car tout le monde se connaît. Des plus âgés aux plus jeunes, tout le monde cohabite ensemble. Un environnement propice à une transmission du legs ancestral de génération en génération », confie le notable.

Il connaît forcément bien Dakar-Plateau, pour avoir grandi à Mbot. « Lorsque j’étais petit dans les années 50, raconte Pa Diossy, je jouais avec mes camarades à l’emplacement du marché Sandaga ».

Pa Diossy, né d’un père infirmier et d’une mère native du « penc » de Mbot. C’est donc avec nostalgie qu’il raconte sa jeunesse dans les années 1950, quand il jouait avec ses camarades sur le site de Sandaga, au cœur de Dakar.

« Ma mère est née à la rue Thiong. Je quittais souvent Hock à Colobane où je suis né pour venir à Mbot dans ma famille maternelle, et j’ai fini par m’installer ici », confie-t-il.

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