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Pétrole cher: le retour

Plus 15% de hausse en trois semaines, plus 30% depuis le mois de mars. Cette envolée du brut est particulièrement sensible à la pompe. C’est le casse-tête de la rentrée pour le gouvernement français. Il cherche à alléger l’addition des ménages sans ressortir le bouclier énergétique qui coûte si cher aux finances publiques. La Première ministre Elisabeth Borne propose que les distributeurs de carburant vendent à perte, une hérésie économique qui dit bien à quel point les gouvernants sont désemparés face à cette hausse qu’ils n’ont pas vu venir. Et pour cause, elle est en partie artificielle. Téléguidée depuis Moscou et Riyad. Les deux plus gros producteurs de pétrole de l’Opep+ referment les vannes pour doper leurs gains.
 
Depuis la semaine dernière la Russie et l’Arabie saoudite retirent quotidiennement du marché un million 300 000 barils
 
Une mesure qui s’appliquera jusqu’à la fin de l’année. Cela représente 1% de la consommation mondiale. Et c’est bien assez pour redresser les cours quand les stocks se dégarnissent. Les Etats-Unis ont déjà puisé l’an dernier dans leurs réserves stratégiques pour apaiser les tensions du marché ; ils n’ont plus beaucoup de latitude pour influer sur le cours du brut. L’alliance de la Russie et de l’Arabie saoudite est un défi considérable pour les marchés pétroliers selon l’agence internationale à l’énergie. Car leurs intérêts sont aux antipodes de ceux des pays importateurs. La Russie sous sanction qui vend son brut avec une décote sur le prix du marché a besoin d’un cours élevé pour financer sa guerre en Ukraine. Quant à l’Arabie saoudite, l’immuable ténor de l’OPEP, elle cherche aussi à maximiser ses gains pour financer l’après-pétrole.
 
L’hypothèse d’un baril à 100 dollars est-elle plausible ?
 
Certaines variétés de qualité supérieure, notamment le brut nigérian expédié depuis le terminal de Qua Iboe, ont déjà franchi ce plafond hier. La plupart des analystes estiment que le seuil symbolique des 100 dollars pourrait être franchi par le Brent dans les prochains mois. Et pas seulement à cause de la politique de l’Opep+. Mais tout simplement parce que la demande augmente. Elle approchera cette année les 102 millions de barils par jour. C’est un comble : plus on parle de la fin nécessaire du pétrole, plus on en consomme. Et par conséquent plus on continue à en produire. Le Canada les Etats-Unis, le Guyana et le Brésil devraient en extraire davantage en 2024 pour répondre à cette hausse de la demande et pour combler le déficit de l’offre qui va se former jusqu’à Noël. Plus vite cette offre sera disponible, plus vite le spectre d’un baril à 100 dollars s’éloignera.
 
Dans l’immédiat, la flambée du pétrole complique la tâche des banquiers centraux
 
Effectivement car en Europe comme aux États-Unis, la hausse du pétrole fait grimper tous les prix. Le rebond de l’inflation observée en août aux États-Unis est due pour moitié à la hausse des produits pétroliers. Les banquiers centraux voient une partie de leurs efforts anéantis par la hausse des cours. Ils seront donc tentés de persévérer dans la hausse des taux pour mater l’inflation. La réserve fédérale se réunit à partir d’aujourd’hui et elle a deux jours pour décider d’un nouveau relèvement de ses taux directeurs. Une décision lourde de conséquence. Si le loyer de l’argent remonte trop vite, trop fort, cela pourrait casser la croissance, et donc réduire la consommation de brut. Ce qui in fine fera baisser les cours. Un paramètre surveillé de très près à Riyad. La récession serait une mauvaise nouvelle pour tout le monde, y compris pour les exportateurs de brut.

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